La famille nucléaire, composée du couple et de ses enfants, était la cellule de base de l’organisation sociale et économique de la Catalogne carolingienne. La dot est l’un des engagements économiques de l’institution matrimoniale qui, durant les premiers siècles médiévaux, consistait en un don du mari à la femme. Le but de cette donation était de fournir à l’épouse un patrimoine qui lui permettrait de subsister en cas de veuvage et, en même temps, de lui garantir un traitement digne.
La documentation considérable qui nous est parvenue de cette période met en évidence la valeur que la société carolingienne accordait aux femmes. Cette considération se retrouve dans les préambules des contrats de mariage, comme celui-ci de l’an 999 :
Le Créateur de tout, Dieu, n’a pas voulu que l’homme vive seul, mais il lui a créé une aide, Ève. Ainsi, des os du premier homme il a formé la femme, de l’un devenant deux, il a montré que les deux ne faisaient qu’un, et qu’il ne pensait pas qu’elle était différente de lui, mais qu’elle avait été faite de lui même. C’est pourquoi il me plaît et convient à moi, mon épouse la plus aimante, de te demander de t’unir à moi dans le mariage. Dans ce but, en présence de nombreux hommes honorables, nous échangeons entre nous les bagues qui représentent les arrhes notre union, pour que la volonté de Dieu soit faite ainsi que celle de nos parents et de nos amis. Et puisqu’un mariage légal ne peut être contracté sans être accompagné d’un titre de dot, pour l’amour que je te porte, pour que ta beauté en soit agrémentée et pour les enfants que nous procréerons ensemble, et je te donne la dixième partie de toutes les choses que je possède, que j’ai pu acquérir ou que je pourrai acquérir avec l’aide de Dieu, et cela je te le remets de la façon dont il est prescrit par les lois des Goths. (Archives de la cathédrale de Vic, cal. 6, n° 1.300, version par Pierre Bonnassie, La Catalogne du milieu du Xᵉ à la fin du XIᵉ siècle. Croissance et mutations d’une société, Presses de l’Université du Mirail, 1975, vol. I, p. 258 et note 3).
La cérémonie de mariage se déroulait devant des témoins, parents et amis, au cours de laquelle les mariés échangeaient leurs alliances et la dot a été présentée. La dot, également appelée dot maritale ou douaire, constituait une grande partie du patrimoine du mari. Au milieu du VIIᵉ siècle, le roi wisigoth Xindasvint a limité la dot maritale à ce pourcentage afin d’éviter les situations de plus en plus fréquentes où la dot maritale devenait excessive, certaines épouses en étant venues à recevoir des montants équivalant à la moitié des biens du mari. La mariée, au moment des noces, recevait de sa famille un héritage composé de vêtements et d’habits et même, dans certains cas, de biens immobiliers.
La femme, mariée ou veuve, participait à l’administration et à la gestion des biens de son mari par le biais de la dot maritale établie dans les contrats de mariage. Cette partie de la loi, recueillie par la loi de Chindaswinthe, apparaît dans la documentation catalane du IXᵉ au XIIIᵉ siècle. On considérait que l’épouse disposait d’un pourcentage de tous les biens que son mari pouvait avoir et que, pour cette raison, elle était impliquée dans toutes ses transactions économiques. Sur cette part des biens, l’épouse avait la pleine propriété et, par conséquent, son intervention et son consentement étaient nécessaires dans toute vente, transfert ou donation du patrimoine familial, puisque, selon la loi, une partie de celui-ci lui revenait.
Mireia Comas Via
Universitat de Barcelona
Bibliographie :
Aurell, Martin. Les noces du comte: mariage et pouvoir en Catalogne (785-1213). Paris, Publications de la Sorbonne, 1995.
Bonnassie, Pierre. La Catalogne du milieu du Xᵉ à la fin du XIᵉ siècle. Croissance et mutations d’une société, Toulouse, Presses de l’Université du Mirail, 1975-1976.
Brocà, Guillem de. Historia del Derecho de Cataluña, especialmente del Civil, y Exposición de las Instituciones del Derecho civil del mismo territorio en relación con el Código civil de España y la Jurisprudencia. Barcelone, Herederos de Juan Gili, 1918.
Comas-Via, Mireia. Entre la solitud i la llibertat. Vídues barcelonines a finals de l’Edat Mitjana. Rome, Viella, 2015.
Lalinde Abadia, Jesús. La dote y sus privilegios en el derecho catalán. Barcelone, Ediciones Anabasis, 1962.
Ordeig i Mata, Ramon. Els orígens històrics de Vic. Vic, Patronat d’Estudis Osonencs, 1981.
Vinyoles Vidal, Teresa. Història de les dones a la Catalunya medieval. Vic-Lleida, Eumo-Pagès, 2005.